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Mon sitcom
14 novembre 2004

King Karl

 

Quitte à être futile autant l'être sérieusement. Alors ce qui va suivre relève une nouvelle fois de l'important, du primordial, du capital. Je veux parler bien entendu de L'événement de l'année. La sortie de 30 modèles signés Karl Lagerfeld (exclusifs chérie, exclusifs) chez H&M le 12 novembre 2004. Finie la déconne, je vous parle là d'une affaire sérieuse, presque d'état... Faut dire que très peu d'informations concernant LA collection ont pu filtrer jusqu'au jour J. Je lis : il n'y en aura pas pour tout le monde, tout risque de s'arracher, la série est limitée. Limitée. C'est la disette, le rationnement, la peur de manquer d'un truc que l'on a pas encore vu. Déjà s'installe la crainte de passer à côté de l'affaire du siècle annoncée. La guerre se profile sur la planète du superflu. Le compte à rebours est amorcé.

 

La jour fatidique, jeudi dernier, j'enfile donc consciencieusement mon costume de gibier publicitaire docile et très consommateur. Je ne crache pas dans la soupe, au contraire je la bois avec délectation. La preuve j'arrive même tôt (enfin ce que j'estime tôt selon mon échelle personnelle du supportable) sur ce qui ressemble déjà à une foire d'empoigne tendance champ de bataille. J'envisageais l'hystérie collective, je ne suis pas déçue. Le magasin est bondé. Les vêtements s'arrachent* (*ceci n'est en aucun cas une image).

 

Dehors beaucoup d'hommes attendent l'air tantôt halluciné, hagard, perplexe, moqueur, blasé ou parfois même tout à la fois. Je suppose que ces éléments masculins ont été enrôlés de force par leurs compagnes enthousiastes. Madame se bat comme une chiffonnière, Monsieur attend, en retrait, terrorisé à l'idée de se faire piétiner par des bêtes de mode en transe devant la moindre étiquette « Karl Lagerfeld for H&M ».

 

Note à moi-même : toutes les femmes sont folles. Je fais partie des cas les plus préoccupants. Prendre rdv en vue d'une désintoxication vestimentaire.  

 

Je me décide à entrer, amusée par le cirque et résignée d'avance. Des gens prennent des photos et immortalise le truc. Car c'est assez indescriptible. Des femmes, que des femmes, un tas de femmes, une masse de femmes, des hyènes défendant leur bout de viscose comme une lionne protège ses petits. Je suis emportée par la foule, me retrouve plaquée contre un portant, à la limite de l'asphyxie. Par terre du verre brisé. Le chaos n'est plus très loin. Karl priez pour nous.   

 

Note à moi-même : je suis allée là-bas VOLONTAIREMENT. Penser à remédier à mes tendances sado-masochistes.

 

Ce qui m'étonne le plus c'est le nombre de femmes d'un certain âge et au pouvoir d'achat certain présentes dans la mêlée. Sale temps pour les riches. Désormais contraintes à l'insolente file d'attente, à l'insultant « comme tout le monde madame ». Dorénavant le roi Karl règne donc sans pitié et sans distinctions.

Le pire c'est qu'elles ont l'air d'aimer ça les vilaines. Dans le bourbier, la bourgeoise s'encanaille, pas peu fière d'avoir décroché son trophée de chasse pour trois fois de rien.

 

Très vite, les vêtements n'ont même plus le temps d'atteindre les portants. Les vendeurs (hébétés et en sueur) sortent de la réserve et tendent robes, chemisiers, shorty transparents à la foule en délire, bras tendus vers le ciel. A chaque réapprovisionnement j'entends des « moi, moi, MOI! », « moi! je veux le chemisier », « moi, j'ai rien eu encore! ». Les femmes ont la dalle, elles ont faim de Karl.

 

Je me revois à l'âge de quatre ou cinq ans sur un manège criard, bien cramponnée au rétroviseur de mon cabriolet rose fluo, essayant au péril de ma courte vie d'attraper ce pompon qui me nargue, me frôle, me chantonne attrape moi si tu peux. A ce moment là plus rien ne compte, Je n'ai plus d'histoire, plus de famille, plus de parents, plus d'amis, c'est une affaire privée, entre le pompon et moi. J'aurai ta peau vieille canaille. Remplacer le ponpom par une robe et vous aurez l'état d'esprit des guerrières présentes ce jour-là.

 

Note à moi-même : les véritables maîtres du monde ne sont pas ceux que l'on croit. Revoir à la hausse le pouvoir d'un Galliano et autre Mc Queen.

 

Je parviens à choper deux modèles au hasard. Le premier ressemble à peu près à ça :

 

 

Robe de cocktail ou de première communion pouvant servir en aucune occasion. J'achète pas mais je devrai déjà m'estimer heureuse d'avoir pu déposer mes doigts de sans le sous sur une création adoubé par le maître. Amen.

 

Le deuxième truc que j'attrape, au moyen d'un put your hands up in the air des plus pathétique, ressemble à une sorte de pièce montée :

 

 

Des volants, des volants, très jolis sur la dame de la photo beaucoup moins sur moi. Bizarre.

 

Après ceci, vous ne viendrez plus ici par hasard.

 

Elle : "Ne me dis pas que tu y étais!"

Moi : "Oh non, je suis juste passée en coup de vent, par hasard, histoire de ..."

Elle : "Mouais, c'est ça..."

 

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Commentaires
L
zamsha> "happy fews", "magazine people", "soldes spéciales presse"...Les mots clés se sont donnés rendez-vous.
Z
chere lorenza (?)<br /> je fais helas partie des happy fews qui etaient à la soirée promo H&M je me suis bourré de toasts de champagne j'ai pris Karl en photo et j'ai eu en prime un sac et autres accessoires gratuits. Bien sûr en prime je suis aussi en photo sur le net et autres magazines people. <br /> Je ris vraiment en lisant ce blog car je pense qu'aux soldes spéciales presse, on est super zen avec des prix à 20%...<br /> <br /> Le monde est trop injuste (c'est pas moi c'est Karl qui le dit
L
cynic> ...<br /> axel> l'appel des grandes causes!<br /> juliet"> ah oui tiens...<br /> flop> je suis allée y faire un tour, les mecs s'en sortent quand même beaucoup mieux<br /> ced> oui c'était ça.<br /> pancake> petite j'ai déjà serré la main d'un maire d'un petit village du Jura...Je suis donc très haut placée à un niveau, disons, hum, politique. Au fait bravo, toi au moins tu ne murmures pas à l'oreille de ces satanés bestiaux. <br /> captain> c'est déjà fait.<br /> vinzz> des banderolles rouges et blanches...J'imagine le tableau et je ris.
V
Je suis allé vraiment par hasard chez H&M le landemain, et yavait encore des banderoles rouges et blanches de travaux pour délimiter l'endroit du carnage...
P
Ce post mériterait plus que cette misère de commentaires. Les gens sont vraiment des petits cons.
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