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Mon sitcom
16 octobre 2005

Monsieur Cinéma

commeau1

- Avant de lire ce qui suit il est recommandé d’avoir déjà visionné (en y prenant un plaisir coupable et ce à n’importe quel âge) Sissi face à son destin et/ou Angélique Marquise des Anges et/ou Le Hussard sur le toit et/ou Légendes d’Automne (filmographie de qualité inégale). Si ce n’est pas le cas merci d’y remédier. Il est temps de relever le niveau.

- Ce post est haché menu mais difficile à digérer.

Vendredi 13h-14h

Je discute avec une amie, C., femme intègre et passionnée (par son métier) n’ayant jamais eu/ou projeté d’avoir recours au moindre ultraviolet artificiel. Le vendredi midi c’est débriefing. Alors on parle de tout (physique quantique, fission nucléaire…) et de rien quoi. Alors vous pensez bien que le numéro de bimbo de la grande gigue Dominique de V. sortant des flots ça nous fait ni chaud, ni chaud si ce n’est peut-être froid dans le dos. On évite d’ailleurs d’en parler, par pudeur et surtout peur d’être gagnées par la superficialité. Manquerait plus que ça, alors on se tient, tant bien que mal.

Et puis rapidement, par ma faute, c’est le dérapage : je ripe sur une paillette, me vautre dans le gloss Diamond Super Sunshine, finit ma chute dans le nouveau lait pour le corps Sephora Girls senteur fraises des bois et parviens à articuler un : « t’as regardé Fight Club mardi dernier ? ». Non, ne pensez pas que cette remarque soit anodine. Certes ils nous arrivent d’aborder des problématiques polémiques relatives au monde télévisuel : Intéressants les socio-types regroupés par Jean-Luc D. mercredi soir non ? Vertigineuse la mise en abyme orchestrée par B. & F. _ _ _ _ _* soir ? (*non je ne connais pas le jour de diffusion, vous si ?).

Mon « t’as regardé Fight Club » est, lui, plus animal, presque inquiet. C. est maligne, se bat bien, tente de nous sauver par l’esquive : « Oh, non, tu sais je l’avais déjà vu plusieurs fois, c’est vrai que l’intrigue est  intéressante ». Là, je craque et me coince définitivement le pied, voire la jambe entière, dans ce satané piège à midinette : « oui c’est vrai et puis Brad P. est a tomber* » (*par terre, liquéfiée et en morceaux). C’est la phrase de trop, C. force à son tour sur le blush parfumé texture fondante : « Oh, m’en parle pas, je voulais enregistrer, je suis dégoûtée ». « Dégoûtée »... Bientôt les « j’adore », les gloussements, les oh, la, la, la, la qui n’en finissent pas. Nous sommes perdues et errons trop parfumées sur les chemins de la féminitude* la plus clichée (*c’est beau, c’est du ELLE, merci pour Elle).

S’en suit un débat, un vrai, relatif au paradigme Brad P. Une dernière fois, pour la beauté du geste, je tente de m’aggriper à ma dignité en lambeaux : « non, non, je n’ai pas vu 7 ans au Tibet ». Silence, prise de conscience, le sol se dérobe à nouveau : « Naaan, c’est pas vrai, bien sûr que je l’ai vu ». Et au ciné en plus ai-je oublié de murmurer. J’étais jeune, 15 ans, il y a prescription maintenant. C. elle aussi se souvient : un poster « acheté exprès », pourquoi on ne le saura pas, de Brad grandeur nature dans son rôle dans Légendes d’Automne (d’à peu près Jim Harrison). Film mythique, enregistré sur bande magnétique. Visionné, re-visionné, arrêts sur image. Le vent des grandes plaines va bien à Brad. Brad s’énerve, Brad casse des trucs, Brad aime à la folie ou pas du tout, Brad s’en va, revient, Brad porte des tricots de peau et des bretelles, Brad prend son bain en pleine nature, Brad est born to be wild. En sous-sol, castagneur, pornographe, misogyne, crade et sanguinolent, Brad garde le cap et reste über classe. Gardera, gardera pas le marcel, le suspense, mesdames, le suspense. Quoi la physique quantique (non, pas cantique) ? Quoi la fission nucléaire ? On vous parle du corps de Brad* là (*prénom ridicule au demeurant), ça vous arrive d’être sérieux deux secondes ?

J’en ai trop dit. C. aussi. Plus d’alibis. Tout s’enchaîne vite, place à la rétrospective. Oui, il m’est arrivé de regarder un film parce que… Parce que Benicio. Oui, j’ai remarqué la « présence » de Robert D. Jr, oui, oui et oui Jude L. a (plus ou moins) influencé mon envie de voir Closer. La conversation est fluide, les masques rangés à la va vite dans les sacs à main. On a les même souvenirs, idem pour les « chocs visuels ». Déboule alors sur le tapis la légende, le monument, le souvenir de :  Olivier M. in Le Hussard sur le toit. On touche au sublime, C. me le confirme. Passion amoureuse et choléra ravageur. Olivier M. alias Angelo est le hussard, Juliette B. LA femme. Il la rencontre en courant sur les toits, enfin pas vraiment mais ceci entraîne cela quoi. Angelo ne parle pas beaucoup, frise l’autisme mais a un regard et un brushing. C’est un fou, prêt à tout, même au pire je-me-retourne-et-je-te-jette-un-regard-qui-en-dit-long. Il est italien, Angelo, il a le sang chaud. La spectatrice a deux choix. Détester Juliette B. ou la détester. On a préféré imaginer l’espace d’un instant que « nous c’est elle » et que « elle » c’est donc personne.

A ce stade de confessions inutiles, il me faut légitimer « le truc », sortir la tête haute de cette vase immonde de romantisme gnangnan parfumée à la violette. J’ai une excuse. J’ai été intoxiquée au toc le plus exalté dès mon plus jeune âge. Voilà le tableau :

Ma grand-mère, 75 ans, femme respectable génialement hystérique, visionneuse compulsive et épanouie de la série des Sissi. Moi, 8 ans, je deviens vite « Sissi addict », émerveillée par cette femme « aux yeux qui brillent » capable de supporter durant 4 épisodes x 1h30 une coiffure alambiquée et lustrée avoisinant les 10 kg (Sissi pas ma grand mère). Elle me le précisera plus tard (ma grand-mère pas Sissi) : il faut souffrir pour être potable. Très vite ma sœur, 4 ans à l’époque, succombe elle aussi à la sirène tyrolienne, Sissi un peu cloche from Tyrol. C’est la spirale, on teste nos limites, poussant même le vice jusqu’à apprendre certains dialogues par cœur.

Avez-vous déjà vu une gamine de 4 ans déclamer, l’air inspiré, du « Sissi face à son destin » dans son petit pyjama jaune poussin et ses pantoufles lapins ? Non ? Moi si. Lors de ces séances du mercredi après-midi, dans le salon familial plongé dans l’obscurité (les dents immaculées de Sissi font office de lumière d’appoint) règne le non-dit. Pourquoi ? Oui pourquoi ma grand-mère a t-elle fait de Sissi une religion ? Pour des raisons strictement professionnelles m’a t-on longtemps laissé croire. Sissi = « belles robes » = source d’inspiration pour elle, couturière fantasque effleurant les tissus mais brassant dans la vie. Elle me dira plus tard de but en blanc : « mais pas du tout, si je regarde tu penses bien que c’est pour Franz ». Sissi elle n'a jamais pu l'encadrer.

Franz, alias François-Joseph, mari autrichien propre sur lui de Sissi, l’Impératrice. Il sourit Franz, il dit des trucs gentils mais a des yeux aussi expressifs que ceux d’une truite à la débine. François-Joseph s’énerve parfois, hoche la tête (gominée la tête, lisse, ultra lisse la tête) pour manifester son désaccord. Il est serviable l’animal et serait prêt s’il le fallait (le scénario ne lui en donnera pas l’occasion) à se débarasser de sa veste lestée de 25 kg de médailles (il est vachement fort à la guerre) pour courir réparer à même la boue une roue de carrosse récalcitrante.

Mais la vérité est ailleurs, je dois l’avouer. A l’époque, Franz je ne le « calculais » même pas (Franz lui-même, au début de l’Histoire, ne calcule pas Hélène en robe jaune bouton d'or et chevelure de jais, jolie comme un cœur mais sœur de Sissi, éperdue d’amour pour Franz-ultra-lisse, amour fou qui la poussera à épouser, par dépit, un autre autrichien aussi insipide qu’une bouteille de limonade Monop' éventée). C’est un peu compliqué, il faut s’accrocher.

Moi je n’avais d’yeux que pour le Comte Andrassy. Le « si » il faut le prononcer « zi » l’air franchement transporté. Un insoumis (il est hongrois), 1,80 de charisme, claquant les portes à l’occasion, montant sur ses grands chevaux dès que le cœur lui en dit, ne parlant que par phrases courtes, viril à point, secrètement amoureux de Sissi qui « ne le calcule pas » ou tout du moins fait comme si. C’est tragique ce gâchis. A 8 ans je réalise que Sissi est un peu conne. La suite me donnera raison.

- Attention phrase lourde -

J’ai en stock d’autres explications légitimant le contenu léger de ce post susceptible de briser à jamais l’image de marque que je n’ai jamais eu. Elevée au 36ème degré et dans le culte lucide du navet, du nanar de qualité, les excuses j’en ai et à gogo.

Il était temps de me libérer de ce poids. J’ose le dire, j’ai (aussi) regardé la saga « Angélique ». Michelle Mercier, apprentie Bardot v/s Robert Hossein. Michelle est Angélique Marquise des anges (ne me demandez pas pourquoi nous risquerions de nous perdre dans les méandres d’un scénario inexistant), Robert est Geoffrey, Geoooofffffreeey dira plus tard Angélique, aux anges, définitivement conquise par la charme du Comte de Peyrac (particule élémentaire de son Geoooofffffreeey). Nicolas, garçon de ferme sans particule, serra lui largué par la Marquise dès le début de l’intrigue, il en perdra d’ailleurs un œil (ne me demandez pas pourquoi), ce qui n’est pas plus mal car cela le rendra par la suite plus sexy (il a la rage et un foulard à la pirate après « l’accident », quoi comment ça je suis un peu bizarre ?).

Vous ne comprenez plus rien ? A la bonheur (bonne heure), nous pouvons donc enchaîner : autant le dire tout de suite, Angélique est super canon (pour l'époque) même Louis XVIII, toutes moustaches dehors, en perd son latin et dit des trucs du genre : « vous êtes insolente, j'aime cela ». Jean Rochefort (si, si en personne avec sur la tête, pour les besoins historiques du film, une peau de Caniche en guise de perruque) est lui aussi accro à la « Angélique Touch ». Le bougre en pince grave* (*« pince grave » j’essaye de rendre l’histoire plus « actuelle » vous me suivez) pour la Marquise des Anges, six couches de fond de teint fixées au vernis, blush tendance peinture de guerre, faux cils touffus et cartonnés, chignon indestructible de couleur indescriptible, bouche ou plutôt moue boudeuse, poitrine comprimée parce qu’il faut que ça pigeonne, ma pauvre dame, que ça pigeonne grave* (*serais-je gagnée par le jeunisme le plus primaire ?).

Bref (mon mot). Angélique est comme ça, belle au naturel. Jean Rochefort est tellement troublé qu’il en deviendrait presque agressif. Elle est blessée la bestiole, en plein cœur (non, pas le caniche qu’il a sur la tête, lui il est mort avant le film). Mais la marquise s’en fout, elle n’a d’yeux que pour le Comte. Au début pourtant, entre eux, ça commence mal. Geoffrey n’est pas assez « beau gosse » à son goût* (*il faut supposer que malgré son maquillage et ses faux cils Angélique parvient à voir ou tout du moins distinguer quelques formes et couleurs). Peyrac est atypique : il boite, est balafré (il est très, très fort à la guerre), porte des chemises blanches à jabots et des cuissardes en cuir noir. Forcement Angélique a un peu peur. En pleine crise de désespoir* (*au départ c’est un mariage forcé) elle court se jeter sur le lit nuptial pour sangloter à sa guise face caméra dans son déshabillé de soie bleu ciel. Moi (9 ans) et ma sœur (5 ans) sommes captivées. Mais que font les parents ? C’est alors que Geoffrey décide de mettre le paquet. Il la joue gentleman, « ne la force pas », se contente de lui toucher les cheveux à l’occasion avec dans les yeux une lueur d’amertume, digne, super signe l’amertume tendance feu de détresse. On le voit s’éloigner jusqu’à la porte de LA chambre, boitillant (le pôôôôvre), puis se retourner pour la regarder. Inspiré le réalisateur* (*ah il y a aussi un réalisateur ?) enveloppe alors THE balafre d’une effet fou et flou à la David Hamilton, le rendu est plus glamour, manque plus que les larmes naissantes et étincelantes genre « là, tu vois, tout de suite, maintenant, je vais chialer à cause de toi ».

Moi (9 ans) et ma sœur (5 ans) sommes très peinées de voir le viril Geoffrey submergé par le chagrin, digne le chagrin, super digne (il en a bavé, il boite et il est balafré, jolie la balafre, elle ira d’ailleurs en s’atténuant au fil de la saga). Bon finalement la bougresse finira par céder, découvrant le potentiel érotique de Geoffrey lors d’une soirée arrosée (signe qui ne trompe pas : rire bruyant combiné à un balancement de tête choucroutée en arrière) en compagnie de l’archevêque et de son staff (ne me demandez pas pourquoi). Geoffrey est vachement sulfureux ce soir-là (regards dits de braise, "allusions" et tout et tout) et Angélique adore "ça".

Moi (9 ans) et ma sœur (5 ans) sommes soulagées.

Les dégâts psychologiques engendrés par ce genre de pratiques cinématographiques sont bien entendu irrémédiables.

Après ces explications, inutile de vous re-préciser que ceci explique cela.

Ce post n’avait aucune vocation si ce n’est de réhabiliter Robert H. dans son rôle à jabot.

Le Hussard sur le toit n’est pas un " film pour bonnes femmes ", c’est un passage obligé et c'est un plaisir.

Que François-Joseph alias Franz repose en paix. Sissi n’a pas fauté mais les historiens ne sont pas formels.

N’allez pas croire que je cherche à me justifier. Ah, si, ça vous pouvez.

C’est tout.

" Moi qui pensais te connaître... Tu comptes vendre le truc à Mireille D.? "

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Commentaires
C
J'ai suivi tes conseils, et ca a marché, j'ai effectivement rencard ce soir avec mademoiselle Carré. Mais c'est avec sa fille, de 20 ans plus jeune, et bizarrement là je suis beaucoup moins d'attaque...<br /> la prochaine je suivrai les conseils de ma voyante, c'est moins risqué....
L
coin> que les choses soient claires : il y Benicio del T. (et johnny D. aussi, ainsi que olivier M.) et puis il y a les autres. <br /> Ca vire blog de fille ici... Mais c'est quoi ce papier peint rose ridicule? <br /> Pour Isabelle C. je te conseille la lettre parfumée ponctuée d'un très inspiré "big kiss" et accompagnée de pétales de roses jaunes fluo en tissu synthétique. Quoi, comment ça je ne suis pas de bons conseils?
C
ah bon, alors toi c'était Brad Pitt?<br /> moi mon amoureuse c'est Isabelle Carré, mais elle le sait pas encore...
L
cynic> ah d'accord. Je me fais des piqures de rappel. Par contre Sissi j'ai décroché, j'aime pas l'eau de rose.
L
godspeed> "et c'est l'accident"...Encore l'un de mes nombreux lapsus...J'ai vite corrigé l'erreur "parce que ce genre de truc ça marque mal" (dixit ma grand-mère, philosophe lucide)
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